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Discours de Hugo Chávez sur la Ve internationale

mardi 6 avril 2010, par Hugo Chavez


21 novembre 2009
Publié dans Inprecor N° 558-559, février-mars 2010.


Du long discours introductif du président Hugo Chávez Frías au Congrès extraordinaire du Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV), le 21 novembre 2009, nous avons extrait les passages directement consacrés au projet de la Ve Internationale.

Dans ce discours, disponible en espagnol, le président Chávez a également longuement parlé de la notion d’avant-garde, de la situation vénézuélienne, de l’éducation, de l’État et la révolution, du « troisième cycle, 2009-2019 » de la révolution bolivarienne : « la décennie des grandes définitions idéologiques, programmatiques, stratégiques, tactiques de la grande construction du socialisme », selon ses termes…


Bonsoir !

Et tout d’abord un salut chaleureux, du fond du cœur, à toutes et tous nos camarades compatriotes. J’ai déjà salué nos invités spéciaux, mais je veux, au nom du peuple vénézuélien, du gouvernement révolutionnaire, saluer de manière toute particulière nos invités internationaux, qui sont tous ici avec nous, les 89 déléguées et délégués venus de 39 pays — y compris, bien sûr, du Venezuela —, de 55 partis politiques de la gauche du monde entier, et qui ont débattu ici ces derniers jours. Il n’y a pas de meilleure occasion que ce moment que vit le monde pour réaliser une réunion internationale des partis politiques. Je veux insister tout d’abord sur l’importance de cette réunion, de ses conclusions qui viennent de nous parvenir —elle s’est terminée cet après-midi, il y a eu une conférence de presse et dès sa fin ils sont arrivé ici en courant et, regardez-les, ils sont tous assis là de manière disciplinée.

Une série d’accords sont le produit de ces débats intenses qui ont duré jusqu’à l’aube hier et toute la journée aujourd’hui. C’est l’engagement de Caracas — je ne vais pas vous lire tout cela, qui devra être publié et maintenant nous devons nous consacrer au Congrès extraordinaire du grand Parti socialiste uni du Venezuela. (…)

Je lis la décision spéciale de la Rencontre internationale des partis de gauche :

« La Rencontre internationale de partis de gauche, qui s’est tenue à Caracas les 19, 20 et 21 novembre 2009, après avoir reçu la proposition du Commandant Hugo Chávez Frías de convoquer une Ve Internationale socialiste en tant qu’instance des partis et courants socialistes ainsi que des mouvements sociaux du monde entier, où nous pourrons harmoniser une stratégie commune de lutte anti-impérialiste, dépasser le capitalisme pour le socialisme et l’intégration économique solidaire d’un nouveau genre, décide de valoriser ladite proposition au vu de sa dimension historique qui suggère un nouvel esprit internationaliste. Aux fins de concrétiser cette proposition à court terme, il est décidé de créer un groupe de travail composé par les partis et courants socialistes, ainsi que les mouvements sociaux qui souscriront à cette initiative, dans le but de préparer un agenda définissant les objectifs, contenus et mécanismes d’une telle instance mondiale révolutionnaire. En ce sens, une convocation est lancée pour une première réunion constitutive au mois d’avril 2010 en cette ville de Caracas. De même, les partis et courants socialistes et les mouvements sociaux ne s’étant pas encore exprimés s’engagent à présenter la proposition à leurs instances dirigeantes légitimes. »

Je vais prendre quelques minutes pour présenter une réflexion sur ce sujet et surtout pour souligner l’importance extraordinaire de sa réalisation. (…)

Il ne s’agit pas d’une coïncidence, mais plutôt des conséquences de processus historiques qui ont conflué, dans ce grand espace de notre Amérique, au moment même que nous vivons, à l’instar de ces pentes qui encadrent le grand Orénoque par exemple, de sorte que le beau cri qui sort de vos bouches, rend honneur aux martyrs qui sont tombés par milliers, qui ont donné leur vie pour la libération de nos peuples.

Ceux qui meurent pour la vie ne peuvent être appelés morts, ils vivent en nous et ils sont pour nous un engagement, un défi colossal, un appel pour la Ve Internationale. Je demande à ce congrès extraordinaire qu’il inclue ce sujet dans son ordre du jour comme un des thèmes à analyser, à étudier dans son contexte, cette proposition de convoquer les partis politiques, les mouvements sociaux, les courants socialistes, les partis socialistes, révolutionnaires de toute la planète, du monde entier, de les faire venir pour créer une nouvelle organisation qui soit adéquate au défi que nous vivons, qui se hisse à la hauteur du cri des peuples du monde, qui devienne l’instrument d’articulation et d’unification des luttes des peuples pour sauver la planète. Parce qu’il faut le rappeler : il y aura un autre sujet important pour l’étude et le débat de ce congrès, sujet que nous attaquons aujourd’hui, mes chers compatriotes, déléguées et délégués — la crise mondiale, la crise écologique (et nous sommes aux portes du sommet de Copenhague, convoqué précisément pour traiter ce sujet, un des plus importants sinon le plus important dans le monde actuellement), le système capitaliste, le mode de production capitaliste, la logique du capital qui a imposé son hégémonie durant les deux cent dernières années à quelques exceptions près, ce mode de production donc, ce développement destructeur qui détruit la planète et qui menace même la survie de l’espèce humaine.

Nous avons les rapports scientifiques — que beaucoup ne veulent pas voir car l’hégémonie mondiale des médias maniés par l’impérialisme nord-américain et les grandes transnationales capitalistes ont réussi à dissimuler une bonne partie de ces informations, issues de recherches sérieuses — qui indiquent que la température de la planète continue d’augmenter, que les grands glaciers, présents depuis des millions et des millions d’années, continuent à se désagréger, que les calottes polaires se réduisent du fait de réchauffement de la Terre. C’est une loi physique : lorsque vous réchauffez un morceau de glace, il fond. C’est ce qui arrive à la planète, le niveau des mers continue à monter. Et malgré tout cela les grands pays capitalistes, à commencer par les États-Unis, qui sont les grands coupables de la destruction de l’équilibre environnemental, de la pollution de l’atmosphère, ne veulent pas assumer leurs responsabilités, ne veulent pas s’engager à réduire les émissions des gaz polluants, ne veulent pas engager des ressources… Ah ! Pourtant ils avaient trouvé des milliards, c’est-à-dire des millions de millions de dollars pour venir en aide aux banquiers, pour aider les grandes banques du monde dans cette tentative — qui sera vaine — de sauver le système capitaliste mondial. Mais ils n’ont pas d’argent pour soutenir et pour prendre l’initiative de programmes qui arrêtent le réchauffement climatique, de programmes définis par nombre de scientifiques. Car on sait ce qu’il faut faire. Et ce alors que certains scientifiques disent même qu’il est déjà tard, que nous sommes déjà en train de franchir le point de non-retour au-delà duquel il n’existera plus de remèdes, comme contre un cancer qui se développe et qui grandit et qu’à un moment il n’y a plus de recours possible. C’est un thème pour l’étude, pour discuter avec vous mes chers camarades, compatriotes, délégués de ce congrès extraordinaire et pour l’étudier, non pas en s’enfermant ici entre quatre murs, non !, mais pour porter ce sujet dans les rues, pour le discuter avec le peuple, pour le diffuser partout car ce congrès ne doit pas se tourner sur lui-même, il doit aller dans les rues, dans les champs, dans les usines, dans les universités et les lycées pour débattre et discuter avec le peuple, avec les communautés.

C’est pour cette raison que j’ai dit que cette réunion me paraît tellement opportune et c’est pour cette raison que j’ai lancé la proposition de la Ve Internationale.

Rappelez-vous que la Première Internationale a été convoquée en 1864 — ici la Guerre Fédérale se terminait, c’est-à-dire qu’il y a un siècle et demi que Karl Marx et un groupe de ses camarades ont convoqué la Ie Internationale. Plusieurs années après, Friedrich Engels a convoqué, à la fin du XIXe siècle, la IIe Internationale et, au XXe siècle, Vladimir Illich Lénine, ensemble avec d’autres grands révolutionnaires, a convoqué la IIIe Internationale et, plusieurs années après, en 1936, Léon Trotsky lance l’idée de la IVe Internationale. Chacune d’elles avait son contexte mais, pourriez-vous le croire, ces quatre expériences en vue d’obtenir l’unité des partis, courants et mouvements sociaux mondiaux sont toutes restées en chemin, pour différentes raisons, certaines sont devenues fortes, d’autres se sont désagrégées en peu de temps, d’autres ont dégénéré, mais en vérité aucune n’a servi, aucune n’a pu aller plus en avant vers les grands buts conçus par ceux qui les ont convoquées. De plus toutes ont été conçues depuis l’Europe, de cette Europe où est née avec force la thèse du socialisme scientifique à la chaleur des grandes luttes populaires, à la chaleur des luttes ouvrières contre la dite révolution industrielle et la domination de la bourgeoisie. Ces expériences sont nées dans le feu de la grande révolution soviétique, elles sont nées en Europe, cette Europe qui était l’épicentre des luttes lorsque au cours de toutes ces grandes années les mouvements sociaux révolutionnaires l’ont agitée. Et ici, en Amérique latine, dans notre Amérique, pendant ce temps nous discutions des affres de l’affreux labyrinthe, pour reprendre les termes de Gabriel García Márquez, car c’était la nuit, comme l’ont raconté ceux qui l’avaient vu, Bolívar pleurait, il pleurait dans sa solitude, notre père, comme l’a dit Neruda, le père de notre terre, de notre eau et de notre air, tout ici porte ton nom dans notre maison, l’ouragan Bolívar, le peuple Bolívar, le parti Bolívar qui est ici, le parti bolivarien, ici nous sommes tous tes enfants et nous rendons hommage à ta mémoire, père Bolívar. (…)

Maintenant nous devons le répandre partout : Bolívar est ici, le père Bolívar, il alerte le monde, l’épée de Bolívar chemine et rend la justice, c’est l’épée de Sandino, l’épée de Morazán [1], l’épée de Sucre [2], l’épée de Manuela Saénz [3], l’épée libertaire de nos peuples. Nous en étions là alors qu’en Europe se levaient les grands courants socialistes révolutionnaires, dans la Guerre Fédérale et ils avaient tué Zamora [4]… Il y a exactement 150 ans, un jour comme aujourd’hui, Zamora arrivait à Guanare, ils avaient déjà libéré Barinas et ont fait une Assemblée constituante dans les plaines du Sud, dans la province de Barinas, et ont commencé a avancer vers le centre du pays… Bon, c’était il y a 150 ans et c’est à ce moment que se levaient les courants socialistes et que fut convoquée la Première Internationale, et quand Friedrich Engels a convoqué la Seconde Internationale, à laquelle participaient Clara Zetkin, Rosa Luxemburg et nombre d’autres grands penseurs, militants et militantes, ici, en Amérique latine, nous étions dans le grand marais. Le XIXe siècle se terminait et nous n’étions pas sortis de ce labyrinthe dont parlait Bolívar une de ces nuits où il pleurait — on raconte qu’il avait entendu crier certains de ses compagnons et qu’il regardait le ciel en disant « Dieu, comment vais-je sortir de ce labyrinthe ? ». Mais le labyrinthe de Bolívar, c’était le nôtre, celui dans lequel nos peuples étaient enfermés. Aujourd’hui nous en construisons la sortie et nous allons devant, avec l’épée dégainée de Simón Bolívar qui nous ouvre la voie !

La marche de l’avant-garde a commencé au XIXe siècle, l’empire nord-américain était encore à venir. Au début du XXe siècle il y avait eu ici une tentative, celle de Cipriano Castro [5], renversée par l’impérialisme… Lénine convoquait la IIIe Internationale, puis Trotsky… Mais maintenant, je crois que nous pouvons dire que le centre de gravité des luttes révolutionnaires de cette planète ce n’est plus l’Europe, c’est le produit des courants temporels. Les mouvements révolutionnaires — et ce n’est pas leur manquer de respect, au contraire — sont modestes en Europe, en Asie, en Afrique, au Moyen-Orient, en Océanie, en Amérique du nord — car même aux États-Unis existent des mouvements révolutionnaires, socialistes — mais tout observateur, tout analyste, chacun qui suit seulement le conseil de la Bible, qui ouvre les yeux pour voir et les oreilles pour entendre, sait que dans le monde d’aujourd’hui, au début du XXIe siècle, l’épicentre des luttes révolutionnaires, des luttes socialistes est ici, en notre Amérique et que le Venezuela est au cœur de cette bataille.

C’est donc à nous d’assumer le rôle d’avant-garde et nous devons l’assumer, nous devons prendre conscience de cette immense responsabilité que nous avons sur nos épaules. Chacune de vous, chacun de vous, camarades, nous le Parti socialiste uni, les partis alliés, le gouvernement, nous sommes devant cette responsabilité. Je fais référence à Fernando Soto Rojas, à son verbe incendiaire, agitateur de tempêtes, et c’est pour cela que je crois honnêtement que l’heure est venue de convoquer la Ve Internationale. Et nous la convoquons depuis Caracas et nous appelons tous les partis socialistes révolutionnaires, les mouvements et les courants qui luttent pour le socialisme, contre le capitalisme, contre l’impérialisme pour sauver le monde. Reprenons les termes de Rosa Luxemburg : socialisme ou barbarie ! — sauvons le monde, faisons le socialisme — sauvons le monde, mettons en échec l’impérialisme — sauvons le monde, défaisons le capitalisme ! Tel sont les enjeux et c’est vraiment l’essence de ce congrès extraordinaire. (…)

Dans la réunion des partis politiques nous avons également approuvé une déclaration de soutien au Honduras, une déclaration spéciale contre le coup d’État au Honduras, c’est aussi un thème que ce congrès doit discuter, car ce congrès que nous installons aujourd’hui, je vais y consacrer du temps, parce que j’ai conscience de l’importance de son succès pour le futur du pays, pour le futur de la révolution. Ce doit être un congrès vivant et non un congrès mort. Si Simón Bolívar, le père Bolívar, avait convoqué le congrès de Panama, s’il s’est donné autant de mal pour ce Congrès amphictyonique, avec une lucide élaboration anti-impérialiste, c’est parce que Bolívar, comme l’a dit Fidel, était le précurseur de l’anti-impérialisme sur ces terres, le premier qui a clairement vu la menace de l’empire et qui l’a nommé : les États-Unis. Et ils ont réussi à isoler Bolívar : quand il est revenu de la Bolivie, du Pérou et qu’il est arrivé à Caracas, il a souffert d’un énorme camouflet. C’est clair, ils lui ont fait des festivités, mais avec un poignard dans le dos, puis ils l’ont expulsé d’ici et lui ont interdit de revenir sur les terres vénézuéliennes, il lui ont interdit de séjourner à Sucre… Et ce ne furent pas les Espagnols, non, ce furent des traîtres, l’aristocratie qui s’est formée en trahissant le peuple et la révolution et l’indépendance. C’est pourquoi je dis que Bolívar, sa douleur, ses larmes, ses pleurs et nous, qui sommes ses enfants, nous devons nous engager pour sortir de ce terrible labyrinthe. Bien, au Honduras une bataille a commencé et — malgré ses douleurs, ses morts, ses persécutés, ses emprisonnés, malgré la répression qui a lieu— je crois que le coup d’État au Honduras va avoir des effets similaires à ceux du coup d’État que nous avons connu ici, car vous savez, cette phrase de Léon Trotsky, je l’ai souvent répétée : toute révolution a besoin du fouet de la contre-révolution. Au Honduras le processus commence, rien n’a été perdu, l’horizon est devant Patricia Rhodes, devant Mel Zelaya, devant le peuple hondurien.

Bien, il y a ici tous les délégués, des ambassadeurs, il y a l’ambassadeur de Bolivie au Venezuela et à travers Toi, Jorge Alvarado, nous saluons Evo Morales, ce grand dirigeant sud-américain, latino-américain et tous les délégués de la Bolivie. Il y a ici l’ambassadeur de Cuba au Venezuela, Rogelio Polanco, à qui nous transmettons le salut au Cuba révolutionnaire, à Raúl Castro, le Président, à Fidel Castro, le dirigeant, le père de nous tous. Germán Espinal, l’ambassadeur du Honduras, est aussi avec nous. Piedad Córdoba, un baiser pour toi et le plus grand amour de ce peuple pour ton courage, ta solidarité de femme colombienne, notre sœur. Et il y a ici les camarades hommes et femmes de la Direction nationale, les gouverneurs, les député-e-s, les invités — José Vincente Rangel est ici, un salut spécial à notre cher José Vincente, toujours présent. Le président Daniel Ortega vient de conclure une intervention en commémorant le premier anniversaire de victoire du Front sandiniste aux élections… Applaudissons et félicitons ici la Front sandiniste et le président Ortega, qui est en pleine lutte et cette lutte, comme je l’ai déjà dit, est mondiale.

En Colombie il y a une grande lutte, au Nicaragua, au Salvador, au Honduras, en Bolivie, en Équateur, partout la lutte est devenue mondiale et le monde est devenu un champ de bataille. C’est pourquoi je crois que la formation de la Ve Internationale est nécessaire et que ce sera celle de la victoire, de l’avancée du socialisme aux quatre coins du monde. (…) ■

Hugo Chávez Frías

* Traduit par J.M. de l’espagnol.


« Créer quelque chose de nouveau ! »
Nous reproduisons ici des extraits, consacrés au projet de la VeInternationale, de son intervention lors de la clôture de la rencontre mondiale des partis et mouvements de gauche, qui s’était tenue à Caracas du 19 au 21 novembre 2009.

Je vous invite à créer quelque chose de nouveau ! Il ne s’agit pas de rééditer des choses qui existent encore, mais qui ne servent pas pour l’entreprise que nous avons devant nous : affronter l’impérialisme et proposer le socialisme comme alternative aux changements du monde.

J’imagine que cette Ve Internationale devrait avoir un comité préparatoire pour travailler, échanger des idées, organiser des réunions par blocs, par pays, par continent. Une école par exemple, un système de formation, une école de cadre, des débats, des publications, etc. Cet effort idéologique et théorique devrait avoir une coordination, une organisation, une stratégie. [...]

Une autre idée dans le cadre d’une organisation qui nous regroupe, certains au gouvernement, certains dans l’opposition... : créer des espaces multiples mais concrets. Je m’explique. Il y a des partis révolutionnaires, de gauche, socialistes, qui sont au gouvernement au niveau local en Afrique, en Asie, en Amérique latine, en Europe, dans des mairies, des espaces régionaux. Une organisation de partis de gauche pourrait faire beaucoup dans ces espaces régionaux et peut-être influer sur les parlements... parfois dans les parlements dominés par la droite, ces projets ne passent pas. [...]

Je vous appelle à bien réfléchir à ce projet. Je demande aux organisations qui existent, certaines auxquelles nous participons, qu’elles n’aient pas peur, parce que nous voudrions nous mettre au-dessus.

Au contraire, ces organisations peuvent aider. Une Ve Internationale doit s’alimenter des organisations existantes qui nous viennent du XX° siècle. Par exemple nous avons en Amérique latine le Forum de São Paulo, très prestigieux et très enraciné, regroupant l’ensemble de partis de gauche, révolutionnaires, progressistes…

Cette Internationale a besoin d’être alimentée par l’expérience de ces expériences, de ces espaces qu’il faut renforcer.

Le Forum de São Paulo, les groupes des partis d’Amérique centrale, des Caraïbes, qui ont un profil distinct de celui qu’on imagine ici. Ils ont des espaces déterminés, un continent, parfois des groupes de partis au gouvernement qui n’ont pas forcément la même étiquette politique.

Depuis l’expérience de 1864 et l’esprit de la Première Internationale, puis de la Seconde qui reprenait le patrimoine légué à l’humanité par Marx et Engels, Clara Zetkin, Rosa Luxembourg, Lénine, Mariategui, Trotski... nous devons créer un socialisme nouveau, qui doit être une « création héroïque » selon le mot de Mariategui.

Mais, pour créer quelque chose de nouveau, nous devons nous alimenter, nous enraciner avec les connaissances accumulées, nous n’allons pas créer quelque chose de nouveau à partir de rien. Rien ne naît de rien : nous devons nous inspirer de ces penseurs, ces acteurs révolutionnaires, indépendamment de comment ils ont terminé leur vie, comment se sont conclues les expériences qu’ils ont aidé à impulser. Unir ces pensées à nos racines indo-américaines, comme le dit Mariategui, à la pensée de nos pères fondateurs, nos libérateurs comme Bolivar, Samartin, Sandino, Farabundo, ceux du christianisme libérateur comme Camilo Torres, de grands hommes comme Che Guevara, Salvador Allende, Manuela Saez, Eloy Alfaro, des martyrs comme Allende, Maurice Bishop, Jorge Eliezer Gaitan.

Permettez-moi l’image, c’est comme la réactivation de tous les volcans. C’est l’heure des volcans ! Ce n’est pas l’heure de la glace, c’est l’heure des fours ! Comme l’a dit une fois José Marti « allumons tous les fours ! Réactivons tous les volcans ! »

Merci beaucoup, merci de votre attention.

Hugo Chávez Frías

* Traduit de l’espagnol par S.V.


CHAVEZ Hugo
Notes[1] Francisco Morazán (1792-1842), homme politique et dirigeant militaire libéral centro-américain, chef d’État du Honduras (1827-1830), du Guatemala (1829), Président de la République Fédérale d’Amérique centrale (1829-1838), du Salvador (1839-1840) et du Costa Rica (1840-1842), trahi par son ami, livré à l’ennemi et fusillé le jour du 21e anniversaire d’indépendance de l’Amérique centrale.

[2] Antonio José de Sucre (1795-1830), leader indépendantiste sud-américain, né à Cumaná (Venezuela), lieutenant de Simón Bolívar, victorieux dans les batailles contre les Espagnols (dont la bataille d’Ayacucho, où le vice-roi a été capturé), président de la province de Quito (1822), du Pérou (élu à vie en 1826, il abdiqua en 1828), il a été assassiné à Berruecos alors qu’il se présentait à la présidence de Colombie.

[3] Manuela Saénz (1797-1856), combattante indépendantiste équatorienne, considérée comme une des premières féministes latino-américaine. Compagne de Simón Bolívar, elle lui sauva la vie par une intervention décidée, lors d’un attentat le 25 septembre 1828 à Santa Fé de Bogotá, ce qui lui valu le titre de « Libératrice du libérateur ». Morte en exil eu Pérou. En 2007 le président équatorien Rafael Correa l’a nommé « Générale d’honneur de la République d’Équateur.

[4] Ezequiel Zamora (1817-1860), militaire et dirigeant politique radical vénézuélien, un des principaux acteurs de la Guerre Fédérale (1859-1863) qui défendit une réforme agraire profonde en faveur des paysans. Considéré au Venezuela comme un socialiste de la première heure — des groupes de guérilleros dans les années 1960 avait pris son nom — il était influencé par les révolutions européennes et l’insurrection qu’il dirigea avait repris les mots d’ordre de « Liberté, Égalité, Fraternité », « Terre et Hommes libres ! », « Élections populaires ! » et « Mort à l’oligarchie ! ». Mort au combat devant la ville de San Carlos en 1960.

[5] José Cipriano Castro Ruiz (1856-1924), militaire et homme politique vénézuélien, chef d’État (1899-1908), il a suspendu le payement du service de la dette étrangère (1902) et a exproprié certaines compagnies étrangères, devant faire face à un blocus maritime du Venezuela par les marines britanniques, allemandes et italiennes.

* Publié dans Inprecor N° 558-559, février-mars 2010.

* Hugo Chávez Frías est président du Venezuela.