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Cuba

On sait, et alors ?

dimanche 4 mai 2003, par Alain Krivine

Alain Krivine revient sur la parodie de justice qu’a constituée la condamnation des soixante-dix-huit opposants au gouvernement de Fidel Castro.

On sait qu’aujourd’hui Cuba est une des principales cibles de l’administration Bush. Rien ne lui est épargné. La situation économique de l’île est de plus en plus difficile et l’on connaît les conséquences terribles de l’embargo dans la vie quotidienne de la population.
On sait le rôle que joue la CIA dans son entreprise de déstabilisation de l’île et l’on connaît en particulier l’activité militante et provocatrice de James Cason, responsable du bureau d’intérêts des Etats-Unis à la Havane.
On sait qu’une partie de l’opposition participe malheureusement à ces activités.
On sait qu’une partie des "démocrates" qui s’indignent du manque de démocratie dans l’île sont par ailleurs les chantres des "valeurs américaines" transportées dans les B52 en Irak ou en Afghanistan On sait enfin que l’administration Bush pratique le terrorisme d’Etat. La guerre contre l’Irak mais surtout les millions de gens qui meurent de faim ou du sida dans le monde à cause de la dictature des marchés étatsuniens en témoignent.
Pour toutes ces raisons, on sait que le gouvernement des Etats-Unis n’a aucune leçon de démocratie à donner à Cuba, lui qui maintient dans le camp de Guantanamo des centaines de prisonniers entravés, sans noms, sans visites, sans inculpations, sans avocats : des morts vivant.
On sait tout cela et alors ?
Au nom de quoi faudrait-il se taire devant la vague de répression qui s’abat aujourd’hui sur l’île ? La défense des libertés et des droits démocratiques élémentaires n’est pas un plat à la carte mais une donnée essentielle de notre combat révolutionnaire et du type de société que nous voulons construire.
Nous sommes contre la peine de mort. Elle est moralement intolérable et politiquement inefficace. Or fusiller à Cuba trois condamnés, une semaine après un procès à huis clos, n’est pas plus glorieux que de brancher la chaise électrique à Atlanta, vingt ans après un jugement. Nous sommes pour que tout inculpé, quel qu’il soit, ait le droit de se défendre, de choisir à temps son avocat et d’avoir un procès public, ouvert aux observateurs étrangers. Tel ne fut pas le cas pour les dizaines de dissidents récemment condamnés à de lourdes peines de prison.
Nous sommes contre tout délit d’opinion. La liberté d’opinion est un droit élémentaire, le débat public une nécessité et la bataille des idées une richesse. Or ce n’est pas aujourd’hui la situation à Cuba.
Alors oui, nous condamnons totalement la parodie de justice qui vient d’avoir lieu. Et nous le faisons avec le double souci de défendre le projet de société socialiste pour lequel nous luttons mais aussi et surtout pour mieux défendre les acquis du peuple cubain et de sa révolution contre l’agression impérialiste.

Alain Krivine.

Rouge 2015 01/05/2003