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"Il n’y a rien de pire que les espoirs déçus"

samedi 7 février 2009

Et voici une entrevue d’Olivier Besancenot (actuel porte-parole de la LCR) dans le journal Métro-France


Et voici une entrevue d’Olivier Besancenot (actuel porte-parole de la LCR) dans le journal Métro-France


La Ligue communiste révolutionnaire est morte, vive le Nouveau parti anticapitaliste ?

Effectivement, une page se tourne. C’est un moment extrêmement important, surtout dans ce contexte de crise. C’est l’occasion d’apporter un débouché politique à tous ceux qui luttent et donner un correspondant politique à l’opposition sociale qui existe en ce moment.

Pourquoi cela ne marchait-il plus avec la LCR ?

On a fait le constat depuis le début des années 90 que ce n’était plus l’outil politique adapté dans un contexte de l’après chute du mur de Berlin. Il nous manquait l’opportunité politique pour créer ce nouveau mouvement. Il y a eu la fin de deux types d’illusion. Tout d’abord de réussir un cartel des forces de la gauche. Pendant plus de 17 ans, on a cherché à le faire et on n’y est plus arrivé. Ensuite, nous avons compris que le mouvement social ne pouvait plus se suffire à lui-même. En refusant d’investir le terrain politique, on finit par devenir une boite à idées et à laisser les partis institutionnels en place. Avec le NPA, nous espérons attirer des personnes issues du mouvement social qui veulent refonder le mouvement anti-capitaliste.

Nous voulons augmenter les salaires de 300 euros pour 85% des salariés

Qu’allez-vous faire de la "main tendue" dimanche par Jean-Luc Mélenchon ?

Nous avons, à notre initiative, déjà tendu une main fraternelle depuis plusieurs semaines. Nous avons d’ailleurs réuni les partis de gauche, dont le PS, pas plus tard qu’hier soir. Maintenant il faut savoir lier les déclarations et les actes. Pour les européennes, nous voulons fédérer toutes les forces anti-capitalistes, mais sur une base très claire d’indépendance vis à vis du PS. Marie-George Buffet et Jean-Luc Mélenchon ont tous deux été ministres de la gauche plurielle. Quelles garanties peuvent-ils nous donner qu’après un éventuel bon coup aux Européennes, les uns et les autres ne retourneront pas vers des alliances avec le PS pour les régionales. C’est de tout ça dont nous allons discuter après le congrès.

Ségolène Royal vous a aussi tendu la main…

Ce n’est pas la première fois. Tout comme Martine Aubry d’ailleurs. Ce qui compte pour nous, c’est la déclaration de fond, qui dit que l’orientation du PS s’inscrit dans le cadre de l’économie de marché. Nous pouvons résister à la droite avec le PS, mais dès lors qu’il s’agit de propositions politiques, il y a une fracture qui justifie notre indépendance politique, puisque nos propositions sont contradictoires avec l’économie de marché. Cette indépendance vis à vs du PS a un coût : s’il y avait un peu de proportionnelle dans les institutions de la Ve république, nous aurions 12 à 13 députés. En même temps, c’est, à long terme, un gage de crédibilité. En politique, il n’y a rien de pire que les espoirs déçus.

Que proposez-vous face à la crise ?

Nous sommes révoltés par les annonces du gouvernement. Ce sont des dizaines de milliards d’euros qui vont aux responsables de la crise économique. Nous voulons augmenter les salaires de 300 euros nets par mois pour 85% des salariés en France, ce qui correspond aux 10% du PIB volés par les plus riches sous forme de subventions ou d’exonérations fiscales depuis 30 ans. Mais aussi la réquisition des logements vides, ou l’interdiction des licenciements et des privatisations. Nous proposons de changer de logiciel : au lieu de créer de la richesse pour une minorité, nous voulons créer des richesses pour les besoins de la majorité de la population et établir une production à la hauteur du strict nécessaire et du strict raisonnable environnemental.

Sur l’environnement, quelles sont les mesures à prendre immédiatement ?

En premier lieu, il faut imposer un réel moratoire sur les OGM. Nous sommes également pour la sortie du nucléaire, et ce n’est pas contradictoire avec un service public de l’énergie. Ensuite, il faut un plan contre le réchauffement climatique, notamment en améliorant l’isolation des habitations. Nous voulons également faire sortir les camions de la route, avec le développement du ferroutage. C’est une solution qui s’oppose directement à la politique européenne sur le fret ferroviaire.

L’industrie automobile souffre, mais son développement va à l’encontre des politiques environnementales. Que préconisez-vous ?

L’industrie automobile est sous la coupe des actionnaires. Quand une entreprise investit un euro dans la recherche, 10 euros vont aux actionnaires. Il faut soustraire cette industrie au pouvoir des actionnaires, notamment en supprimant les subventions publiques dont ils bénéficient.

Fallait-il sauver les banques ?

Plutôt que, d’un coté, "renationaliser" du bout des lèvres des banques privées en difficulté et de l’autre, privatiser des groupes bénéficiaires comme La Poste, nous proposons de réunifier l’ensemble des banques, qui aient le monopole du crédit en expropriant les intérêts privés.

Que va-t-il se passer après la mobilisation de jeudi dernier ?

On fera tout pour que ce mouvement unitaire se poursuive. Il y a beaucoup de conflits en cascade dans les régions : nous sommes en grève depuis plusieurs jours à La poste des Hauts-de-Seine. Il y a des mécontentements dans le service public hospitalier, dans les universités. La Guadeloupe a montré l’exemple : un mouvement social de masse et populaire. Et, sans nostalgie aucune, je pense que la France aurait bien besoin d’un nouveau mai 1968