KIA Babak
8 octobre 2009
* Paru dans « TEAN » n° 25 (08/10/09).
Mis à mal sur le plan intérieur par la persistance de la mobilisation démocratique, le régime iranien semble prêt à faire des concessions sur le dossier nucléaire.
Après quatorze mois d’interruption, les négociations sur la question du nucléaire iranien ont repris, le 1er octobre à Genève, entre les dirigeants des États-Unis, de Russie, de Chine, de Grande-Bretagne, de France, d’Allemagne et d’Europe et le négociateur de la République islamique, Saïd Djallili.
Ce nouveau round de discussions succède à une intense agitation où chacun a voulu montrer ses muscles : « découverte » par Barack Obama, Nicolas Sarkozy et le Gordon Brown d’un d’un nouveau site nucléaire iranien près de la ville sainte de Qom, essais de missiles de longues et moyennes portées par l’Iran, déclarations guerrières des dirigeants israéliens. Ce regain de tension a été savamment orchestré par les puissances occidentales qui profitent de la crise de régime que traverse la République islamique depuis la réélection contestée d’Ahmadinejad. Conscient de son affaiblissement, le pouvoir iranien a tenté de jouer sur la fibre nationaliste de la population en faisant procéder à des tirs de missiles.
Mais la presse internationale a omis de dire que la rencontre de Genève a aussi été précédée des gestes réciproques de « bonne volonté ». Le gouvernement américain a autorisé le ministre iranien des Affaires étrangères, Manoucher Mottaki, à venir à Washington, une première depuis trente ans. Mottaki été chargé par le Guide suprême de la révolution islamique, Ali Khameneï, d’apporter à Obama de nouvelles propositions de Téhéran. Le pouvoir iranien a pour sa part permis à des diplomates américains de visiter les trois touristes arrêtés cet été pour avoir pénétré illégalement en Iran.
Les négociations de Genève ont mis en lumière l’état de faiblesse du régime iranien. En brandissant le renforcement des sanctions, notamment contre le secteur pétrolier iranien, les grandes puissances ont contraint Ahmadinejad à un recul sur le dossier nucléaire.
Ainsi, un accord pourrait intervenir pour que l’Iran fournisse l’uranium enrichi à moins de 5% (taux nécessaire pour le nucléaire civil) à la Russie qui le ferait enrichir à 20% avant que la France ne le transforme en combustible nécessaire au réacteur de recherche de Téhéran, sous contrôle de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).
Confrontée à un conflit profond au sommet du régime et à une crise économique forte, l’Iran doit également faire face à une contestation populaire qui ne faiblit pas. Sur plan intérieur, Khameneï tente de résorber la crise qui fait rage au sein du sérail et de retrouver une certaine marge de manœuvre. En signe de détente, il a ordonné la libération de plusieurs dirigeants du camp « réformateur ». Il a également fait procédé à des remaniements de la direction des Gardiens de la révolution. Sur le front extérieur les dirigeants iraniens ont décidé de calmer le jeu.
Plus que jamais, il y a pour le mouvement progressiste et antiguerre plusieurs combats indissociables à mener de front. D’une part, la lutte contre les impérialismes, les menaces d’interventions militaires et les sanctions économiques frappant d’abord le peuple iranien et la lutte pour la dénucléarisation du Moyen-Orient et donc d’Israël, seul à posséder dans cette région un arsenal atomique. D’autre part, la construction d’une solidarité active avec celles et ceux qui luttent pour la justice sociale, les libertés et l’égalité et veulent en finir avec la République islamique.
Babak Kia