Le rapport Montmarquette propose l’augmentation des tarifs dans les services publics au Québec : hausse de 34 % de la facture d’électricité, hausse des frais de scolarité à l’université à la hauteur des frais exigés dans les universités canadiennes (environ 5000$ par année), hausse des frais de garde, installation obligatoire de compteurs d’eau, instauration des péages routiers… Tous les services publics devraient devenir l’objet d’une tarification.
Pas surprenant que le patronat soit aux anges. La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante parle de « bouffée d’air frais ». L’Institut Économique de Montréal juge l’approche préconisée par le groupe de travail emballant et souhaite que toute hausse de tarifs soit compensée par une baisse d’impôt…
Le gouvernement Charest, lui, a décidé de ne pas acheter trop ouvertement ce rapport néolibéral. Il a décidé de consulter les partis d’opposition, Mais il compte bien, si on se fie aux déclarations de Madame Jérome-Forget, s’en inspirer et imposer patiemment et progressivement les propositions qu’il contient.
Une orientation néolibérale qui s’attaque à la solidarité sociale construite autour des services publics.
Le rapport de Claude Montmarquette essaie de fonder les vertus de la tarification en présentant sa généralisation comme un moyen essentiel pour éviter la surconsommation et le gaspillage. Il ne nous explique pas comment la hausse des frais de scolarité éviterait la surconsommation des études universitaires ; il ne nous explique pas davantage quel gaspillage pourrait nous éviter la hausse des frais de garde. Bien sûr, il faudrait se méfier des personnes malades et de leur propension à trop utiliser les services de santé… Voyons donc !
Au lieu de voir les services publics comme l’expression d’une solidarité collective agissante visant à répondre aux besoins de l’ensemble de la population, le Conseil du patronat prétend que la tarification « est un outil privilégié pour infléchir les comportements de façon à la fois efficace et équitable. » « Payer des impôts selon les revenus pour des services introduirait des iniquités envers ceux qui ne les utilisent pas. En réduisant les impôts, on permet à chacun de faire ses propres choix tout en s’assurant par la tarification que les services publics sont de qualité. » C’est là une justification ouverte et cynique de l’égoïsme des possédants. Ce ne serait que les malades, les exclus et les pauvres qui utiliseraient des services publics que les possédants devraient payer par leurs impôts. C’est pourquoi il s’empresse de souligner que la tarification ouvrirait enfin la possibilité de baisser les impôts sur le revenu.
La boucle serait ainsi bouclée. Le sous-financement des services publics conduirait directement à la dégradation des services offerts aux usagers et usagères et à un accroissement considérable des inégalités dans l’accès à ces services. La privatisation pourrait d’être lors être présentée comme la solution aux déficiences des services publics. N’est-ce pas là un scénario bien connu appliqué dans la santé. On veut maintenant nous faire avaler la même médecine mais à large échelle.
Le gouvernement Charest prépare ses mauvais coups de demain…
En demandant ce rapport, le gouvernement Charest poursuivait une série d’objectifs : introduire dans le débat public des arguments qui favorisent la généralisation de la tarification, qui s’attaquent à la gratuité des services au lieu d’en faire un objectif. Le gouvernement libéral cherchait à normaliser et légitimer aux yeux d’une partie de l’opinion un accès inégalitaire aux services, la régulation par les tarifs ne jouant que pour les plus démunies. C’est une politique odieuse… et le seul fait qu’il cherche à ne pas heurter de front la population et qu’il repousse à plus tard l’application de ces recommandations n’est rassurant que pour les personnes à la mémoire courte et à la naïveté mur à mur… Et on ne pourra compter sur Pauline Marois pour s’opposer à ces propositions antipopulaires du rapport Montmarquette qu’elle a même trouvées intéressantes. Misère !