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Déclaration finale de la rencontre en défense de l’humanité.

dimanche 9 novembre 2003

Déclaration finale de la rencontre en défense de l’humanité.
(Mexico)

Nous, intellectuels de milieux académiques, des secteurs de communication, de la culture et des mouvements sociaux de différentes régions du monde, participantEs de la rencontre internationale « En défense de l’humanité » qui s’est tenue dans la ville de Mexico, dans le but de réfléchir à la gravité de la situation internationale, et conscients de notre responsabilité faisons la déclaration suivante :

Déclaration :

L’humanité est arrivée à un point critique qui entraîne de sérieux dangers. Une nouvelle barbarie s’esquisse. Il ne s’agit pas seulement du fait qu’une minorité ait concentré une proportion énorme de la richesse alors que des masses paupérisées ont à peine de quoi vivre. Le système hégémonique fonctionne comme une machine d’exclusion sociale.

Un nombre toujours plus important d’êtres humains sont déclarés inutiles pour l’expansion du modèle et l’idée se répand que les organismes publics n’ont pas à se préoccuper du sort de ces exclus de la globalisation.

Si le destin de ces exclus importe peu, leurs valeurs et leurs cultures, leurs identités et leurs communautés importent encore moins, à moins qu’ils se voient réduit aux impératifs du marché. Les communautés humaines et les modes de vie spécifiques, sous l’empire de cette vision d’exclusion, sont destinés à l’extinction. Avec eux, des millions de travailleurs surexploités, soumis à l’arbitraire des capitalistes et à l’érosion constante de leurs droits souffrent également.

L’environnement, la biodiversité et les écosystèmes dans lesquels l’humanité a vécu pendant des millénaires se devenus des objets de commerce et d’accumulation au service d’intérêts privés. L’eau et les autres ressources fondamentales à la vie humaine sont sous l’emprise de ces mêmes intérêts. Le consumérisme et le gaspillage des ressources sont les normes promues par le capitalisme néolibéral.

L’humanité affronte des dangers qui attaquent directement sa vie sociale, culturelle et environnementale. Cette menace ne vient pas de forces naturelles, mais des pouvoirs économiques et politiques qui nient le plus hautes valeurs élaborées tout au long de l’histoire et qui portent aux nues l’avarice et l’égoïsme.

La diversité est le propre de la société humaine et elle a résisté à toutes les tentatives d’homogénéisation. Néanmoins, les projets d’uniformisation socioculturelle sont les objectifs de cette domination. De telle sorte que le pluralisme de l’humanité peut être converti en instrument de discorde, d’affrontements entre les peuples, en fondamentalismes et en haines ethniques. Dans le cadre de cette globalisation excluante, les dites lois du marché requièrent une humanité indifférenciée et uniformisée. Mais la diversité linguistique et culturelle des peuples et des nations s’affirme au delà des efforts pour convertir la société humaine en une réalité homogène. De fait, contre les espoirs des idéologues de la globalisation, et malgré les pressions néolibérales, nous assistons à une renaissance des luttes ethnico-nationales dans le monde entier liées aux luttes sociales et prometteuses de nouveaux horizons libérateurs.

Les centres du pouvoir prétendent imposer leur propre particularité socioculturelle a toute l’humanité, sous le prétexte qu’elle constitue la véritable et unique forme humaine de vie authentique. Contre cette tendance, nous affirmons que la diversité du monde est une valeur en soi et une richesse pour l’humanité.

À l’aube du XXI siècle, l’impérialisme dans ces différents expressions, alliances et contradictions internes s’est converti en un méga-pouvoir de caractère politico-militaire dans lequel les États nationaux renoncent à l’intérêt public.

« L’égale souveraineté » des membres de l’Organisation des Nations Unies (ONU) telle que l’affirme le premier article de la Charte constitutive de 1945, a été mise entre guillemets. A moins d’une demi-siècle de la Seconde guerre mondiale cette organisation viole son propre cadre juridique : « supprimer toutes les gestes d’agression et infractions contre la paix »(Art 1) ; le règlement pacifique des conflits » (art. 3), le rejet de « l’utilisation de la force contre l’intégrité territoriale » (art. 4) ; le non-intervention dans les affaires internes des États (art. 7), d’autres résolutions qui affirment le « droit inaliénable des peuples à l’intégrité de leur droit territorial » (1960).

Dans ce sens, la légitimation de l’attaque et de l’occupation militaire de l’Irak par les États-Unis (résolution 1511 du Conseil de sécurité des Nations Unies) laisse en suspens les espoirs de paix que les peuples avaient placé dans l’ONU.

Le messianisme idéologique qui définit l’équipe politique à la Maison Blanche représente un danger pour la paix mondiale. Le gouvernement nord américain attaque et offense sans distinction les pays refusant de se plier à sa politique impériale et à sa doctrine de « guerre préventive » menaçant de mener le monde à des affrontements militaires sans fin.

Pour le gouvernement des États-Unis, l’unique « loi internationale » valide est celle que dicte son Congrès et le pouvoir exécutif. Toute autre interprétation court le risque d’être associé au « terrorisme ». M ême l’ONU, dans ses textes officiels distingue le terrorisme des formes de résistance nationale à l’occupation étrangère et du droit à rébellion consacré dans plusieurs constitutions du monde.

Ainsi, les responsables des actes de terrorisme de l’État les plus atroces, accusent d’être des « terroristes » les patriotes qui luttent pour la liberté de leurs peuples. Les actions secrètes, l’emploi de mercenaires, la violation des droits humains, l’application de l’extra-terriorialité aux prisonniers de guerre et l’incitation à l’assassinat des chefs d’État, comme dans le cas d’Israël pour les leaders palestiniens, forment le cadre politique contemporain.

En 1989, les puissances impérialistes affirmaient qu’avec la chute du mur de Berlin , le monde entrerait dans une nouvel ère d’entente et de prospérité assurée. Néanmoins, d’autres murs conspirent contre cette affirmation : les murs à la frontière du Mexique et des États-Unis et en territoires palestiniens occupés, les murs légaux et raciaux dans les législations des pays de l’Union européenne qui accordent un traitement indigne aux immigrants des pays pauvres. ; les murs économiques de caractère protectionniste qui bloquent l’accès au « libre-marché » avancé par le néolibéralisme ; les murs qui violentent les droits des femmes et des enfants ; les murs d’intolérance sur les orientations sexuelles, sur les choix, les habitudes et les modes de vie de l’humanité ; les murs politico-économiques qui marginalisent le continent africain.

En Amérique latine les États-Unis continuent à menacer Cuba du risque d’une intervention militaire directe contre une révolution qui durant 45 ans a résisté à d’innombrables campagnes de déstabilisation, d’agressions et de blocus économique, grâce à son enracinement populaire et à sa ferme volonté de construire un autre type de société. Pour cela, il est nécessaire d’intensifier la solidarité et de raffermir les liens avec l’île assiégée et de rejeter toutes les agressions du gouvernement américain.

L’Amérique aux américains » du nord est la nouvelle consigne des faucons qui occupent le pouvoir à Washington. Grâce à la Zone de Libre-Échange des Amériques (ZLÉA) et au Plan Puebla-Panama, l’impérialisme prétend imposer ses propres « lois » du marché. Le discours que propose d’élargir la démocratie et la liberté » a sa contrepartie, la militarisation croissante de l’Amérique latine. Cela démontre une fois de plus, que la démocratie pour l’impérialisme n’a qu’une valeur instrumentale : il l’appuie dans ses aspects formels si cela convient à leurs intérêts, il conspire contre elle, si les forces populaires accèdent au pouvoir par la voie démocratique. Ce concept est nul et irrecevable s’il est utilisé par des dirigeants alliés au néolibéralisme comme une carte blanche pour s’emparer des ressources pour le capital transnational.

Cela est illustré par le fait que dans le cadre du « Plan Colombie » et sous prétexte de combattre le « narcoterrorisme », le Pentagone a installé une grande base militaire dans le port de Manta (Équateur), facilitant les interventions dans l’ensemble des pays de la sous-région andine. De même, les gouvernements du code sud sont obligés de participer à de fréquentes manoeuvres militaires conjointes avec les États-Unis, en présupposant que dans la dite « triple frontière » (Argentine, Brésil et Paraguay) se retrouveraient des groupes terroristes islamiques.

Le néolibéralisme stigmatise le conflit social et fomente des phénomènes de désarticulation des projets communautaires (clientélisme), aliène l’action politique (démagogie), stimule l’aliénation culturelle, donne des réponses philanthropiques à la pauvreté (assistancialisme) et réprime politiquement et militairement le mécontentement populaire.

Face à ces politiques, une nouvelle génération d’intellectuels solidaires et de combattants s’est levée contre les manigances des politiciens professionnels et corrompus. Une société indignée et munie des armes invincibles de la conscience et de la capacité d’organisation, les Boliviens se sont lancés dans la défense de leurs ressources naturelles et se sont débarrassés d’un gouvernement totalement à la solde des États-Unis.

La rébellion populaire en Bolivie coïncide avec la résistance civile et politique en Haïti contre le pouvoir personnel et autoritaire de Jean Bertrand Aristide, avec celle de Puerto Rico qui exige le démantèlement de la base navale nord-américaine de Vieques ; avec celle de l’Argentine et des chômeurs qui bloquent les rues ; avec celle des indigènes de l’Équateur qui se sont levés contre le racisme et la discrimination, avec celle du Brésil et de ces paysans sans terre qui voient avec inquiétude leurs revendications repoussées, avec celle du Mexique qui défend ses ressources stratégiques face à la voracité des transnationales et avec celle les résistants zapatistes qui élargissent la lutte pour l’autonomie, avec celle du Venezuela et des militants qui ont entrepris de défendre la révolution bolivarienne, et en fin avec celle du Chili, et de ces jeunes qui luttent contre un modèle sophistiqué d’exclusion sociale.

(Première partie) - la deuxième partie sera publiée la semaine prochaine.

Ont signé cette déclaration :

Claribel Alegrìa / Martín Almada / Samir Amín / Atilio Borón / Harry Bellafonte
Hernando Calvo Ospina / Michele Capuano / Ernesto Cardenal
Cuauhtémoc Cárdenas Solórzano / James Cockcroft / Luis D’Elía
Theotonio Dos Santos / Roxanne Dunbar-Ortiz / Lawrence Ferlinghetti Pablo González Casanova / Alfredo Guevara / Martha Harnecker / Francoise Houtard Saul Landau / Walter Lippman / Evo Morales / Adolfo Pérez Esquivel / James Petras
Gerard Pierre-Charles / María Rojo / Carlos Taibo / Ines Venturi
Gaspar Llamazares / Daisy Zamora / Howard Zinn

Traduction La Gauche
http://www.defensahumanidad.org/