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LE CONGRÈS D’ATTAC-QUÉBEC

Élargir le combat contre la marchandisation néolibérale au Québec

par Ronald Cameron, mercredi 15 octobre 2003,

dimanche 19 octobre 2003

Le 3e congrès du groupe québécois de l’Association pour la taxation des transactions financières pour l’aide aux citoyens, mieux connue sous le nom d’ATTAC, a eu lieu samedi le 11 octobre à Montréal et réunissait plusieurs dizaines de personnes de quelques régions du Québec. Au cœur de ce congrès, on retrouvait une volonté d’élargir le groupe ATTAC-Québec et d’approfondir sa mission.

Le mouvement ATTAC est né en France en 1998 dans la conjoncture de mobilisation contre la mondialisation néolibérale. Partant de l’idée de militer pour la mise en place d’un système de taxation des transactions financières au bénéfice de la majorité de la population, ATTAC est partie prenante, ici comme ailleurs, des principales mobilisations altermondialistes des dernières années. Comme l’indique sa plate-forme, les objectifs du mouvement ATTAC se situe dans une perspective de consolidation et de reconquête d’un espace démocratique mondial, en s’attaquant au prétendu « droit » des investisseurs et des marchands.

Le site de l’organisation internationale d’ATTAC (www.attac.org) est traduit en cinq langues et présente des liens avec des sites nationaux dans 35 pays. En France, le mouvement ATTAC a connu un développement phénoménal. Il compte plusieurs dizaines de milliers de membres et quelques 250 comités locaux.

Une contribution essentielle à l’éducation populaire

Au Québec, le groupe a été fondé en avril 2000. Présent dans un dizaine de régions, il compte 800 membres. Le deuxième congrès, tenu en octobre 2001, fut marqué d’espoirs importants de développement. Il réunissait près de cent personnes au lendemain des manifestations qui ont eu lieu au Sommet des Amériques d’avril 2001.

Les deux dernières années ont permis d’enraciner une pratique continue d’information et d’éducation. On retrouve sur le site d’ATTAC des publications nombreuses sur différents enjeux. Plus, on y retrouve des capsules d’information et de formation sur le néolibéralisme, les marchés financiers, la taxe Tobin, l’évasion fiscale. ATTAC offre de tenir, auprès des syndicats et groupes sociaux qui le désirent, des formations sur ces sujets.

L’an dernier, ATTAC a tenu une journée d’étude sur les fonds de pension, avec l’appui des amis-es du Monde Diplomatique et de Forum intersyndical. ATTAC-Québec a participé aux différents Forum social mondial à Porto Allegre. Il fera de même cette année à Mumbaï. Dans la région de Québec, ATTAC tient une émission de radio sur la bande FM à CKRL (89,1). Il bénéficie aussi d’une reconnaissance de l’École de service social de l’Université Laval ainsi que du Centre de formation populaire (CFP) à Montréal.

Une première à ATTAC-Québec : l’adhésion d’une section d’un syndicat SCFP

La demande d’adhésion de la section locale 2000 du Syndicat des employés-es des techniques professionnelles et de bureau d’Hydro-Québec a été annoncée immédiatement après l’adoption par le congrès d’un amendement aux statuts et règlements, permettant que des groupes puissent dorénavant adhérer à ATTAC-Québec.

En effet, une majorité importante du congrès a confirmé la proposition du Conseil d’administration après un débat qui a permis de clarifier les enjeux d’une telle décision. Cette amendement exclue toutefois l’adhésion de groupes politiques, afin de protéger son caractère non partisan. Le mouvement ATTAC est lui-même un mouvement politique dans lequel peuvent coexister différentes tendances qui partagent les objectifs de la plate-forme.

Mais cette section locale SCFP ne doit pas demeurer la seule. D’autres groupes peuvent faire la même démarche et demander leur adhésion à ATTAC-Québec. Le rôle que peut jouer ATTAC dans l’éducation populaire est importante et passe par des interventions directes auprès des organisations syndicales et des groupes sociaux.

Par de telles adhésions, le groupe ATTAC pourra mieux répondre aux besoins de formation des syndicats qui pourront ainsi bénéficier d’un cadre à la fois social et politique extérieur aux préoccupations syndicales quotidiennes mais aussi un cadre intersyndical.

Mise sur pied d’un Conseil scientifique

Par ailleurs, le Congrès a convenu de la mise sur pied d’un Conseil scientifique à l’instar de l’instance qui existe à ATTAC-France. Ce conseil très large a un objectif évident : renforcir la crédibilité d’ATTAC-Québec et lui offrir un appui d’intellectuels québécois. Parmi les noms qui ont été signalés à date, on note Gaétan Breton, Omar Aktouf, Jacques Gélinas, Jean-Louis Bourque.

Quelles perspectives pour le prochain mandat ?

De plus, la tenue d’ateliers et la discussion sur les perspectives a permis d’apprécier de nombreuses possibilités d’intervention. Il reviendra toutefois au Conseil d’administration de clarifier plus particulièrement les éléments précis de l’intervention à mener dans le prochain mandat.

Deux grands axes ont été retenus : le soutien aux brigades d’intervention citoyenne (BIC) qui seraient éventuellement initiées par la coalition CAP Monde ; la participation au réseau de résistance contre la montée de la droite qui organise, entre autres, une manifestation le 21 octobre prochain.

Toutefois, le souci premier qui est ressorti du débat a porté sur l’importance d’approfondir la mission d’ATTAC et d’organiser des activités spécifiques. Au travers de ce débat, la question des perspectives était effectivement soulevée. Qu’arrive-t-il avec la campagne sur la ZLÉA [1] ? Qu’en est-il du Forum social Canada-Québec-Premières nations qui est annoncé pour le printemps prochain ? Comment contribuer aux luttes sans sacrifier la mission d’ATTAC. Par ailleurs, les élections fédérales s’approchent et la venue de Paul Martin peut aussi être des occasions pour faire valoir le point de vue d’ATTAC, entre autres sur les paradis fiscaux, même s’il a vendu ses parts de la Canada Steamship Lines à ses enfants.

Mais, parmi les actions soulevées à la suite des ateliers, on remarque cette idée d’une campagne pour faire reprendre par les conseils municipaux du Québec des résolutions qui les amène à soustraire leur ville de l’application d’éventuels accords sur les services, tel la ZLÉA ou l’AGCS [2].

Mentionnons que les dispositions de l’AGCS amènent, entre autres, que tout service municipal, qui a un équivalent dans le secteur privé, doit être obligatoirement offert à l’entreprise privée.

Une telle campagne sur l’AGCS est déjà engagée indépendamment d’ATTAC. Plusieurs villes au Canada-anglais se sont déjà prononcées. En France, ATTAC a mobilisé pour faire pression auprès des municipalités et a obtenu que plusieurs centaines de municipalités se déclarent à l’avance soustraite de tels accords.

La nécessité que se développe le groupe ATTAC dons son rayonnement auprès des groupes comme au plan de sa crédibilité va de pair avec son implication dans les luttes. Il apparaît essentiel que coexiste non seulement la mission éducative d’ATTAC mais aussi celle de s’impliquer dans des combats citoyens. Comme composante d’un tel mouvement citoyen, l’action d’ATTAC doit permettre à reconquête d’un espace démocratique au bénéficie du plus grand nombre.


[1] ZLÉA : Zone de libre échange des Amériques.

[2] AGCS : Accord général sur le commerce des services.