"Nous sommes les jeunes RebELLEs qui ont répondu à un appel féministe et nous sommes fières de nous dire féministes. Nous reconnaissons qu’il existe de multiples interprétations du féminisme et nous célébrons et intégrons cette diversité [...]"
Nous sommes engagées à favoriser l’expansion continue de la pluralité de nos voix. Nous sommes engagées dans un processus constant de réflexion autocritique visant à alimenter et transformer notre mouvement. Nous reconnaissons qu’au cours de l’histoire, le mouvement féministe occidental majoritaire a exclu les femmes « altérisées » qui sont représentées comme « autres » ou extérieures à la norme blanche par l’idéologie colonialiste. Nous sommes déterminées à apprendre de notre passé, à honorer les luttes menées par nos prédécesseures et à nourrir nos rêves pour l’avenir. Nous apprécions le soutien de nos alliés qui appuient nos luttes féministes pour l’équité et la justice.
Nous sommes des femmes de diverses capacités, ethnicités, origines, sexualités, identités, classes, âges et « races ». Nous comptons parmi nous des femmes employées, sous-employées et sans-emploi, des mères, des étudiantes, des décrocheuses, des artistes, des musiciennes, et des femmes dans l’industrie du sexe. Nous pensons que les personnes trans, bispirituelles et intersexuées font partie intégrante de notre mouvement. Nous reconnaissons et respectons la fluidité des genres et appuyons le droit à l’auto-identification. Nos espaces non mixtes sont ouverts à toutes celles qui s’identifient et vivent socialement comme femmes.
On nous dit que le féminisme est dépassé. Si c’était vrai, nous n’aurions pas besoin de dénoncer le fait que :
Dans la réalité, bon nombre des revendications de nos mères et de nos grand-mères demeurent sans réponses. Les femmes continuent à être victimes de violence sexuelle. Nos communautés sont hantées par le silence qui entoure ces agressions. Dans tout le Canada, et bien que nous y ayons droit, les services d’avortement demeurent insuffisants. Partout au pays, des femmes colonisées, marginalisées, racisées et handicapées se voient forcées de subir des avortements non-désirés ou sans disposer des informations adéquates, sont obligées d’avoir recours à la contraception ou même sont stérilisées contre leur gré. L’hypersexualisation des femmes dans les médias nous a appris à voir les femmes comme des objets sexuels plutôt que comme des êtres humains à part entière. La jouissance, le lesbianisme ou le fait d’être queer sont tabous et le choix d’une femme de rechercher le plaisir sexuel est perçu négativement. Nos identités sont érodées dès notre plus tendre enfance, alors que notre éducation, la télévision et les magazines nous dictent que notre apparence, notre façon de nous habiller et notre façon d’agir sont déterminées par notre sexe. La violence est normalisée, les agressions sexuelles érotisées. Notre éducation à la santé sexuelle est inadéquate et nos droits reproductifs sont bafoués. Nos besoins sont loin d’être comblés.
Dans la réalité, les femmes représentent la majorité des personnes défavorisées. Notre gouvernement enlève les enfants de femmes pauvres et autochtones. Le capitalisme exploite les femmes de la classe ouvrière et confine les femmes des classes moyenne et supérieure à des rôles de « consommatrices ». On nous dit que l’égalité est acquise, mais l’écart salarial persiste. Les femmes immigrantes se voient refuser la reconnaissance de leurs diplômes et sont forcées d’endurer des conditions de travail intolérables pour pouvoir demeurer en sol canadien. Nous manquons de services de garde abordables et accessibles. Les femmes continuent d’être sous-payées, leurs contributions sont dépréciées et leur travail rémunéré est sous-valorisé. Nous avons gagné le droit de vote, mais la discrimination fondée sur le sexe perpétue la sous-représentation des femmes dans les institutions politiques.
Dans ce monde globalisé, notre solidarité féministe doit s’internationaliser. Les actions des élites politiques et économiques canadiennes causent préjudice aux femmes à travers le monde, et ce, de façon spécifique. Les guerres, les génocides et la militarisation entraînent notamment l’utilisation du viol comme arme de guerre, des féminicides et l’exploitation sexuelle de milliers de nos sœurs. Le libre-échange contribue à accroître l’insécurité sociale, économique et culturelle des femmes. En réponse à l’impérialisme canadien, nous construirons une solidarité féministe mondiale. Dans ce monde soi-disant postféministe, nos rôles sociaux continuent d’être définis par une vision traditionnelle du genre. Les forces religieuses et politiques qui visent à maintenir les piliers du pouvoir dans notre société nous empêchent de faire valoir nos droits. Nous dénonçons l’actuelle montée de la droite conservatrice dans la société canadienne et les reculs que cela a entraîné pour l’avancement des droits des femmes. Nous sommes dépouillées de certains droits conquis de haute lutte par celles qui nous ont précédées. La géographie marginalise les femmes qui vivent dans des régions isolées, rurales et du Nord où elles n’ont pas accès à certains services de base. Manifester notre solidarité avec nos sœurs implique un effort pour comprendre tous les enjeux que nous devons affronter – y compris ceux liés à la « race », à la classe et au genre – et de nous tenir debout toutes ensemble contre les oppressions.
Enfin, nous dénonçons l’attitude qui disqualifie et évacue le mouvement féministe sous prétexte qu’il est redondant. Notre lutte n’est pas terminée. Nous serons postféministes quand nous vivrons dans un postpatriarcat.
Féministes, unissons-nous !
À BAS le legs colonial de génocide et d’assimilation des peuples autochtones, en particulier des femmes autochtones
À BAS le sexisme et le racisme de la Loi sur les Indiens
À BAS les traités non respectés
À BAS l’assimilation
À BAS le profilage racial
À BAS la soi-disant politique multiculturelle du Canada
À BAS les va-t-en-guerre et le pouvoir militaire
À BAS les politiques racistes de la protection de la jeunesse
À BAS les stéréotypes dans les médias
À BAS les génocides et les féminicides
À BAS les vol de femmes et d’enfants
À BAS LE COLONIALISME
REBELLONS-NOUS CONTRE les banques qui prennent toute la planète en otage
REBELLONS-NOUS CONTRE les compagnies pharmaceutiques qui institutionnalisent la santé des femmes
REBELLONS-NOUS CONTRE les espaces publics qui ne sont pas accessibles à tous les corps
REBELLONS-NOUS CONTRE le développement qui détruit la nature
REBELLONS-NOUS CONTRE le système de classes qui nous maintient dans la pauvreté et nous prive de logements sécuritaires et abordables
REBELLONS-NOUS CONTRE l’État qui force d’autres pays à adopter le système capitaliste
REBELLONS-NOUS CONTRE la dévaluation du travail des femmes, qu’il soit salarié ou non
REBELLONS-NOUS CONTRE les entreprises qui font de l’argent sur notre dos
REBELLONS-NOUS CONTRE les publicitaires qui détruisent notre estime de nous pour mieux nous la revendre
REBELLONS-NOUS CONTRE LE CAPITALISME
RÉVOLTONS-NOUS CONTRE les industries qui nous poussent à haïr notre corps et notre sexualité
RÉVOLTONS-NOUS CONTRE l’hétérosexisme qui nous fait croire qu’il n’y a qu’une façon d’être, d’aimer et de vivre notre sexualité
RÉVOLTONS-NOUS CONTRE la socialisation des enfants basée sur des catégories raciales, des mensonges coloniaux et des conceptions binaires du genre
RÉVOLTONS-NOUS CONTRE les systèmes d’éducation qui renforcent la famille nucléaire hétéronormative
RÉVOLTONS-NOUS CONTRE la droite religieuse et son influence sur les politiques d’État et les lois
RÉVOLTONS-NOUS CONTRE le viol et la violence envers les femmes
RÉVOLTONS-NOUS CONTRE l’objectification et le contrôle du corps des femmes
RÉVOLTONS-NOUS CONTRE tous les projets de loi, stratégies et lois antichoix
RÉVOLTONS-NOUS CONTRE la division sexuelle du travail
RÉVOLTONS-NOUS CONTRE la pauvreté, la dépendance et l’oppression économique des femmes
RÉVOLTONS-NOUS CONTRE les programmes de soutien du revenu fondés sur l’état familial plutôt que sur le statut personnel
RÉVOLTONS-NOUS CONTRE les masculinistes, leurs fausses allégations et arguments démagogiques
RÉVOLTONS-NOUS CONTRE l’exploitation sexuelle
RÉVOLTONS-NOUS CONTRE LE PATRIARCAT
Nous souhaitons des communautés engagées à :
Éradiquer toutes les formes de violence – incluant la violence sexuelle, institutionnelle, émotionnelle, économique, physique, culturelle, raciale, coloniale, âgiste ou dirigée contre des personnes vivant avec une incapacité
Contester toutes les formes d’oppression, de pouvoir et de privilège
Reconnaître que les autres luttes contre l’oppression ne peuvent être séparées de la nôtre, parce que nous sommes toutEs intrinsèquement liéEs et prendre conscience de la position de chacunE dans les différentes structures d’oppressions tout en luttant pour les éliminer
Libérer nos enfants et nous libérer nous-mêmes des conceptions binaires du genre
Bâtir des institutions et des structures qui font la promotion des principes de justice, de paix et d’égalité
Éliminer les inégalités économiques
Financer et soutenir des services de garde abordables et accessibles ; et que chaque mère ait la liberté économique d’assumer son rôle parental comme elle le souhaite
Apprendre et enseigner la véritable histoire des femmes, des victoires et des luttes que nous avons menées, particulièrement celles des femmes de couleur et des femmes autochtones
Lutter contre la stigmatisation et la honte des survivantes de problèmes de santé mentale et de troubles psychiatriques, et soutenir leurs luttes.
Nous allons : Changer d’attitude : nous fâcher, refuser, résister, claquer la porte, riposter !
Nous allons : Transformer nos vies quotidiennes et nos relations : chaque petite interaction peut devenir un terrain d’action
Nous allons : Encourager chaque personne à se connaître, à s’aimer et à prendre soin d’elle-même et de son corps
Nous allons : Favoriser la création d’espaces sécuritaires et accessibles où les personnes pourront se définir et s’exprimer sans crainte d’être jugées
Nous allons : Créer des alternatives, écrire de la poésie, des articles, des lettres, faire de l’art
Nous allons : Nous unir avec d’autres, trouver des terrains communs, bâtir des communautés, créer des espaces et des rassemblements féministes, sensibiliser, éduquer, diffuser nos idées
Nous allons : Croire qu’un monde meilleur est possible et travailler à le construire
Nous allons : Nous organiser et lutter : bâtir des alliances avec les organisations féministes existantes et en créer de nouvelles, lutter ensemble et en solidarité, être vues et entendues, déranger, troubler, déstabiliser les pouvoirs établis, devenir des « saboteuses culturelles »
Nous allons : Construire des solidarités basées sur les points communs de nos diverses luttes et perspectives
Nous allons : Valoriser les gens plutôt que l’argent et les profits
Nous allons : Exiger un réinvestissement massif de l’État dans les programmes sociaux et la fin des privatisations
Nous allons : Organiser des journées pancanadiennes d’actions féministes décentralisées contre la montée de la droite
Nous allons : Dénoncer, résister et combattre les projets de loi et les lois sexistes qui menacent nos droits reproductifs, les lois d’immigration racistes, la guerre, le libre-échange, la criminalisation des mouvements sociaux et des militantEs, l’exploitation par les entreprises, le pillage de la terre et la violence envers les femmes
Nous allons : Défendre et promouvoir la sécurité, le respect, la justice, la liberté, l’égalité et la SOLIDARITÉ !
Ce manifeste a été adopté au Rassemblement pancanadien de jeunes féministes Toujours RebELLEs / Waves of Resistance, à Montréal le 13 octobre 2008.
Ceci est un appel à l’action !
Informe-toi, implique-toi !
www.rebelles2008.org
info@rebelles2008.org