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Au cul de sac du ralliement national,

Opposons une nouvelle alliance sachant articuler la défense des revendications ouvrières, populaires, féministes et jeunes à la mobilisation pour l’indépendance du Québec !

dimanche 23 novembre 2003

Le gouvernement péquiste a été tout à fait incapable d’organiser la riposte aux offensives fédérales. Au lieu de compter sur l’importante mobilisation nationale qui s’était construite autour du référendum québécois, le gouvernement péquiste, dirigé par le politicien conservateur, Lucien Bouchard, a fait de la poursuite du déficit zéro, le principal objectif du gouvernement péquiste. Il a élaboré la théorie de la passivité nationale - la théorie des conditions gagnantes - alors qu’il matraquait les forces vives qui s’étaient prononcées le plus massivement pour le oui au référendum, les travailleurs et les travailleuses en emploi, particulièrement ceux et celles qui sont syndiquéEs.

Après le départ de Bouchard, le gouvernement Landry a continué les mêmes politiques néolibérales, tout en essayant de maintenir ses alliances avec les directions des classes subalternes de la société québécoise dans une perspective de réformisme de recul, le moindre mal étant élevé au rang de principe. La défaite du gouvernement Landry est l’expression de la crise de confiance majeure dans sa capacité de mener la lutte pour l’indépendance et du rejet de ses politiques antisociales.

Le PQ est en crise stratégique.

Il n’a aucune perspective sérieuse pour réussir maintenant là où il a échoué des décennies durant. Il est incapable de faire un bilan sérieux de ses incapacités. Essentiellement, ce que ne peut reconnaître la direction péquiste, c’est que son contrôle de la lutte nationale l’oblige : a) à refuser toute mobilisation politique autonome des masses organisées de façon démocratique ; b) à nier le lien entre la lutte nationale et la lutte pour les revendications sociales et démocratiques. Les nationalistes étroits font toujours de cette séparation la clé de l’unité la plus large. En cela, ils font fausse route.

La compréhension péquiste de la souveraineté populaire se limite à l’expression d’un vote dans un référendum au 15 ans. Cette cécité politique qui a tout d’un horizon de classe limité et est bien exprimée par Jean-Pierre Charbonneau, qui, avec une sincérité désarmante, s’avère incapable de dépasser la double obligation à laquelle a toujours été soumise son parti. Ce qui l’amène à opposer encore une fois la lutte nationale à la lutte sociale. C’est ainsi qu’il écrit dans son article publié dans Le Devoir « Des lendemains référendaires ratés » (Jeudi, le 9 octobre 2003), « l’urgence nationale n’est pas tant la réingénérie de l’État de Charest, si dangereuse soit-elle, que son plan de normalisation du Québec au sein du Canada ».

La défaite aurait pu ouvrir un débat important de réorientation au sein du PQ. Cela aurait impliqué qu’un bilan réel et sérieux eut été fait des échecs successifs du Parti québécois. Cela aurait également impliqué, que le parti fut encore un lieu de débats. Mais l’important, pour les ancienNEs ministres et autres responsables, c’est d’une part, de garder le contrôle sur les aspirations nationales tout en cherchant qu’elles seraient les voies qui leur permettraient de reprendre le plus tôt le pouvoir. Le PQ aurait pu être secoué par un débat déchirant. En effet, entre les indépendantistes qui ne veulent plus rien entendre de l’association et ceux et celles qui veulent que le PQ se tourne (sans abandonner une référence rhétorique à la souveraineté) vers la défense d’un fédéralisme asymétrique, (un nouvel autonomisme qui se contenterait pour le moment de la reconnaissance de la nation québécoise et d’un renouvellement du partage des pouvoirs en faveur du Québec dans la fédération canadienne), il y a là des différences d’orientation incompatibles. Les divergences opposent aussi ceux et celles qui font des alliances avec les directions syndicales un axe de leur gestion politique des classes subalternes et les éléments plus proprement néolibéraux qui voudraient que le social-libéralisme soit poussé encore plus loin dans son sens néolibéral (et qu’on relativise les alliances passées avec les directions syndicales). Sur ces deux axes de débats, les positions intermédiaires sont multiples et s’entrecroisent plus qu’elles ne se chevauchent. Des débats sérieux auraient pu faire apparaître et cristalliser ces multiples divergences et auraient pu faire entrer le PQ dans une crise majeure.

La direction péquiste n’est pas intéressée à ouvrir des débats réels sur ces questions et à trancher clairement. Elle est plutôt décidée à répéter le pareil au même. Qu’il s’agisse de Landry, Legault, ou Marois), l’essentiel reste de se draper de la phraséologie souverainiste pour continuer à rester en selle sans faire un bilan. La « saisons des idées » ne durera guère longtemps, car rien de ce qui en sortira peut avoir un poids quelconque. La meilleure preuve, c’est la réaction de Landry à la remise en question de l’importance de l’association par les deux candidatEs à la course (avortée) à la chefferie du parti. Ce dernier s’est dit d’accord avec cette position alors qu’il avait souligné l’importance de cette orientation quelques semaines auparavant. En fait, l’important pour Landry, c’est la consolidation de son leadership sur le parti et de mettre le couvercle sur tout débat politique sérieux au sein du parti. La direction péquiste cherche à faire miroiter la reprise du pouvoir sous sa direction aux prochaines élections. En utilisant, comme toujours, l’idée d’un référendum dans les cinq prochaines années, assurés qu’elle est de leur retour éminent au pouvoir... Non seulement la direction péquiste n’est pas intéressée et n’a pas intérêt à l’ouverture d’un débat stratégique au sein de leur parti, elle n’est pas intéressée à favoriser une quelconque mobilisation sur cette question.

Landry s’accroche à la direction. Il souhaite diriger le PQ aux prochaines élections. Il fait le pari que le PQ peut continuer à capitaliser sur les aspirations nationales sans livrer la marchandise, grâce à l’alliance interclassiste que le PQ a su construire dans les dernières décennies. Il part du postulat, que l’administration Charest en remettant en question les acquis de l’État social, encore plus frontalement que son propre gouvernement, sera incapable de reprendre pouvoir. Entre-temps, il invite tout les candidatEs annoncéEs à rentrer dans le rang. Sans course au leadership, la « saison des idées » n’aura été rien plus qu’un épisode aidant à digérer la défaite. De plus, la direction péquiste, commence à se présentera de plus en plus comme un parti progressiste. Un groupe de députés écrit sans honte « Le parti québécois est un parti progressiste, un parti animé par une passion pour la justice sociale qui l’éloigne des prescriptions de la droite. » (Le Devoir,23 octobre 2003). La direction péquiste va jouer cette carte à plein. Sans compter que certains indépendantistes qui pensent pouvoir construire une mobilisation efficace en restant de côté le projet de société progressiste. Ils croient qu’un vaste ralliement national suffirait à remporter les prochaines élections et à proclamer, en comptant sur la majorité des voix, l’indépendance du Québec. Ces gens ne comprennent pas le véritable enjeu de classe que constitue la perspective indépendantiste et néglige de tirer au clair les positions des différents acteurs sur la scène nord-américaine face à l’indépendance. Au lieu de rêver à des raccourcis, ils devraient essayer de tirer au clair les nécessités stratégiques, le type d’accumulation de forces et d’alliances qui devront être nouées pour rendre cette perspective possible. -Nous y reviendrons.

Le rôle de repoussoir joué par le gouvernement Charest sur des secteurs importants de la population et la relative stabilité des alliances du PQ avec tous les réseaux de connivences dans certaines directions des organisations syndicales et communautaires et chez différentes édiles régionales peuvent permettre à la direction péquiste de gérer sa crise stratégique pour toute une période. Refouler les débats, écraser les ambitions concurrentes, manipuler la phrase souverainiste et la phrase sur la justice sociale quand c’est nécessaire pour faire face à certaines pressions et à certaines mobilisations, voilà comment cette crise va être gérée dans les prochains mois. Mais la crise stratégique va perdurer. La recomposition d’un véritable mouvement de libération nationale ne passera pas par un front construit autour du PQ ; elle nécessitera la constructoin d’une organisation autonome des classes ouvrière et populaire qui fera de cette lutte un axe de sa construction.

La rupture avec le PQ est loin d’être complété chez les progressistes du Québec. De plus, même le processus amorcé chez des couches importantes n’est pas irréversible. Exagérer la réalité de cette rupture peut conduire à sous-estimer la dureté du combat à mener. Compter sur que le PQ serve d’appui dans la lutte contre l’offensive néolibérale du gouvernement Charest, c’est se préparer des lendemains qui vont déchanter et c’est repousser à plus tard encore les nécessités politiques de l’heure.

Une nouvelle alliance de classe au Québec sachant articuler la défense des revendications ouvrières, populaires et féministes à la mobilisation nationale contre l’oppression de l’État canadien est une nécessité sur la relance de la mobilisation populaire pour l’indépendance du Québec. Cette alliance doit trouver son socle dans un parti des travailleurs et des travailleuses indépendantistes actif et militant, qui saura utiliser tant la lutte électorale que la lutte de masse. L’Union des Forces Progressistes est un jalon important cette voie. Un jalon qu’il faut construire. La construction du parti doit se faire dans une optique d’indépendance de classe vis-à-vis tous les partis nationaliste bourgeois si nous ne voulons pas encore une fois reprendre la route si souvent empruntée qui a mené à la désorganisation politique des classes ouvrière et populaires au Québec.